Comme dans un rêve...
9h du matin, la bouche pâteuse, quelque peu désorienté, j’émerge tous juste après une courte nuit s’apparentant plutôt à une longue sieste. Je fais preuve au réveil, comme souvent ces derniers temps, d’une étonnante souplesse puisque j’ai à nouveau la tête dans le cul…
Mais je ne résiste pas à l’envie de vous conter mes aventures nocturnes ! Pour cela retour dans le passé, 12h en arrière pour être précis…
20h55, soirée free car rien de prévu. Une liberté totale de mes mouvements ce soir. Passion prenante, mon choix d’activité pour la soirée s’oriente tout naturellement vers le poker. Mais la période n’est pas en ma faveur. Je rechigne un peu à jouer online où c’est carrément le désastre actuellement… Mais ce soir point d’amis à l’horizon pour brasser des jetons et distribuer des cartes. Et il est trop tard pour convoquer une table.
Mon PC est ouvert. Winamax aussi… Il me tend les bras, une petite voie me quémande d’ouvrir une session, elle me rassure pour mieux m’attirer et me chuchote dans un coin de l’oreille : « Vient mon ami, vient jouer, tu es dans mauvais cycle certes, mais ça va tourner… Fait moi confiance. »
J’ai peine à la croire et pourtant elle me convint.
Et elle me convint juste à temps pour m’inscrire dans le genre de tournoi qui m’attire en ce moment : les deepstack.
Il est 20h59 et je m’inscris, sans conviction je dois bien l’avouer, à ce 50€.
Beaucoup de prétendant à la victoire finale ce soir. Habituellement, deux grosses centaines de combattants, mais ce soir est soir d’affluence.
Avec 355 adversaires, le prise pool devient intéressant. Cela me booste un peu le moral pour aller chercher quelque chose. L’ITM interviendra à 40 left et l’heureux vainqueur verra sa bankroll gonfler de 4 bons gros milliers d’euros…
En parcourant rapidement la liste des inscrits, je comprends assez vite le pourquoi du comment de l’engouement soudain du soir. En effet, parmi la liste qui défile sous mes yeux aussi vite que mon doigt active la roulette de mon rongeur préféré, je découvre la participation de plusieurs professionnels.
Et c’est avec une surprise non dissimulée que je vois une bonne partie de la team Winamax inscrite! Un petit coup d’œil sur le chat m’apprendra la raison de cette présence massive des hautes sphères pokériennes de Winamax : Ils se sont lancés dans un petit défi entre eux, avec side bet à la clef comme de bien entendu. A qui ira le plus loin… Dixit le chat, le side bet serai conséquent, de l’ordre de 1000€ par tête !
Le tournoi s’annonce périlleux mais d’autant plus intéressant et motivant.
21h. Les tables s’ouvrent et je suis partagé entre peur et excitation. Mon compagnon de droite n’est autre que Davidi Kitaï, allias Kittbul. Le plus français des joueurs belges, réputé très actif, va marcher sur la table, c’est sur ! Heureusement, j’aurais la position sur lui, un moindre mal.
Ma stratégie de début de tournoi est simple. Prudence maximum voire auto card dead. Et ce, pendant au moins 2 à 3 tours de table coûte que coûte. Ma discipline doit être de fer. Je veux fixer mes adversaires avant d’agir.
La distribution commence et je me vois débuter en BB.
Et ma discipline va en prendre un coup d’entrée malgré moi. Comment pourrais-je coucher cette première main alors que j’ai deux beaux A rouges devant moi ?
A partir de là, cela s’enchaîne à la vitesse de la lumière.
En milieu de parole, un joueur relance à 4BB, le bouton 3bet à 11BB. La configuration est parfaite pour moi. Je sens que je peux emmener l’un des deux à tapis pré flop et je relance à 25BB.
Insta push tapis du premier larron, immédiatement suivi par le bouton.
Je n’ai plus qu’à appuyer sur F2 et prier pour que mon American Airlines tienne !
Je ne peux m’empêcher de manifester ma joie par un contenu « Yes ! » lorsque je découvre que je fais face à deux paires de roi ! Le flop, hauteur 9 et arc en ciel, m’assurant la gagne, mon second « Yes ! » est beaucoup plus sonore tout comme le « C’est bon ça ! » qui l’accompagne !
Un départ idyllique. Me voilà à 60050 (merci Kittbul pour la SB) et accessoirement chip leader. Déjà une satisfaction de pouvoir dire que je l’aurai été une fois.
Ma stratégie est automatiquement revue et étant donné la profondeur acquise avec ce coup, je m’autorise à élargir ma range dés à présent en rentrant avec toutes les mains spéculatives qui se présenteront.
Mais je ne jouerais quasi plus rien mise à part mes blinds. Une impression d’avoir pris un abonnement aux poubelles m’enveloppe. Tant est si bien que mon stack se trouve presque inchangé à la première pause où je sors entretenir mon futur cancer des poumons.
Les deuxièmes et troisièmes heures ne sont guère plus heureuses mais je monte quand même régulièrement quelques jetons supplémentaires, principalement en jouant pré flop.
Me voilà après 4h de jeu et je suis clairement retombé dans la nasse avec 84000 pions.
Le chips count m’annonce 37ième sur les 55 survivants, bien en dessous de la moyenne qui est à plus de 120000. Mais la situation n’est pas alarmante. Avec mes 20BB, je ne suis encore pas dans la zone rouge. Cependant, il va falloir agir et prendre des risques, la bulle approche, et je n’ai pas envie de la jouer ultra short, en risquant de perdre mon tournoi contrains et forcé sur un coup de dé aléatoire. Quitte à sauter hors de la monnaie, autant le faire de suite afin de gagner quelques minutes, voire heures, de sommeil. Ainsi que de diminuer le sentiment de frustration qui augmente exponentiellement à l’approche de la bulle.
Et c’est là que mon tournoi va véritablement commencer ! Je me mets à rentrer dans beaucoup de coups et le pire est que je vais toucher systématiquement. En l’espace de 20 minutes, mon tapis va grossir telle une truie se gavant dans un champ boueux ! Je vais littéralement me gargarisé en quintuplant mon stack à l’aide, successivement, d’une quinte flopée, de trois brelans face à des doubles paires, d’une magnifique couleur contre une quinte max et, cerise sur le gâteau, d’un full aux 7 par les 6 qui étrille le full… aux 6 par les 7 de mon infortuné adversaire.
La bulle n’est plus un souci à ce moment là et quand elle éclate enfin, j’ai virtuellement 4 jolies jetons de 100000 devant moi !
Avec plus de deux fois la moyenne, je traverse la suite du tournoi avec la délicatesse d’un ouragan frappant la Nouvelle-Orléans.
Arriver en table finale devient, presque, une formalité. Je danse sur ma table. Je virevolte au dessus de mes adversaires. Je manie un Boeing 747 pendant que mes copains de tablée peinent à diriger leurs vieux coucous…
Fort de mes 2.6 millions de chips, la TF, que j’aborde en chip leader, va être une partie de plaisir !
De plus, point de professionnels assis à cet ultime buffet. Pour la petite histoire, c’est le benjamin du team, Tristan Clémançon, qui s’octroiera le side bet en finissant aux portes de la finale, 14ième!
Je suis clairement au dessus. Personne n'ose revenir sur mes relances. Toutes mes actions passent. Les décisions à prendre me semblent évidentes. Je respire les cartes. Madame soleil m'habite. Je suis en trance. En un mot, je suis le boss. A tel point que l'on me renomme Hugo.
Un à un mes compagnons de table finale rompent sous mes coups de buttoir. Un seul résiste à mes assauts, caché sous son pseudo "Papy47".
Plus que 5 joueurs, puis 4, 3 et c'est le heads up final face à Papy. Celui-ci est déséquilibré en ma faveur. Je possède 5 millions, contre 2 gros millions. Le face à face est disputé. Chaque pion est ardemment défendu. Mais force est de constater que, petit à petit, je me fais grappiller, ronger, dégrossé. Le bien nommé Papy fait de la résistance. Et mieux que ça.
Nos stacks s’équilibrent sensiblement mais je garde la tête de cordée pour quelques centaines de millier quand intervient, ce que je ne sais pas encore, l'ultime main de ce tournoi.
Depuis le bouton, comme à chaque fois, je relance à 2.5BB avec, cette fois-ci, ma main préférée : Q7 à cœur. Mais papy défend en callant.
Le flop s'ouvre sur un merveilleux Q77. Papy mise les 2/3 du pot.
Cette fois je l'ai ferré. Je n'ai plus qu'à mouliner et le ramener tranquillement sur la rive, en le délestant le plus grassement possible. Je fais gonfler le pot en relançant petitement. Papy paye.
La turn est une brique et ne change rien. Papy check non sans avoir pris son temps.
Je mise le pot. Je suis sur qu'il a une belle dame qu'il ne lâchera plus. Et Papy mort une fois de plus en me relançant.
C'est le moment de le mettre dans l'épuisette et j'envoie tapis. Insta call de Papy qui me montre QQ pour un full max flopé... Je suis quasi card dead. Le poisson n'est autre que moi. Non seulement il m'a attrapé, correctement hameçonné par la gorge. Il m'a enfiloché et me voilà quasiment dans la poêle, prêt pour la friture...
Le temps d'attente pour voir tomber la river est insoutenable, d'une durée infinie... Mais elle apporte mon seul out avec le dernier 7 du paquet!
Les GG et autres félicitations fusent dans le chat.
J'ai gagné! La perf tant espérée est là. Je suis aux anges. Je ne peux m'empêcher d'hurler, de bondir...
C'est comme dans un rêve...
Mon premier geste est d'appeler mon ami pour lui narrer cette formidable prestation, pour partager ma joie.
Je prends mon portable, commence à pianoter les 10 chiffres me séparant de la nouvelle que je vais lui annoncer. Tous se bousculent dans ma tête, je tremble de bonheur. Je n'ai plus qu'à lancer l'appel en appuyant sur le bouton vert quand mon portable me coupe la chique en sonnant...
Il me faudra quelques secondes pour réaliser. C'est mon réveil matin qui vient de sonner.
4h du matin, la bouche pâteuse, totalement désorienté, j’émerge tous juste après une courte nuit s’apparentant plutôt à une longue sieste. Je fais preuve au réveil, comme souvent ces derniers temps, d’une étonnante souplesse puisque j’ai à nouveau la tête dans le cul…
Il faut aller finir la semaine. Je prends mon poste de travail à 5h...
J'espère juste avoir fait un rêve prémonitoire...